Enfants voleurs du Trocadéro : Procès en décembre pour traite d’êtres humains aggravée

Publié le 22/11/2023 sur 20 Minutes avec AFP

Photo : R.Le Dourneuf / 20 Minutes


 

Six ressortissants algériens comparaîtront en décembre à Paris pour traite d’être humains aggravée, soupçonnés d’avoir, près de la Tour Eiffel, initié à l’usage de psychotropes des mineurs isolés étrangers pour mieux les pousser à voler.

Les six hommes, âgés de 23 à 39 ans, comparaîtront également pour trafic de stupéfiants, psychotropes et recel de vols, a appris l’AFP, ce mardi, de source proche du dossier. Un septième sera jugé pour trafic de psychotropes et recel de vol de mars à mi-juin 2022, mais pas pour traite.

 

Des vols commis sous la contrainte et l’emprise chimique

Ce procès, qui se tiendra au tribunal correctionnel de Paris les après-midi des 14, 15, 19 et 20 décembre, est « important », a réagi Guillaume Lardanchet, directeur de l’association Hors La Rue, qui repère et accompagne les enfants et adolescents étrangers en danger.

« Ces gamins ne sont pas des angelots, mais ce sont des victimes. Et on ne lutte pas efficacement contre les troubles à l’ordre public si on réprime les victimes. Il faut les protéger, en leur permettant d’accéder à leurs droits, à des foyers de protection de l’enfance… », a poursuivi Guillaume Lardanchet.

« Si ces mineurs commettent des délits, c’est sous la contrainte et sous emprise chimique. Ce prisme est le bon : il faut se concentrer sur ceux qui contraignent et qui font obstacle aux actions de protection de ces enfants. Ce sont eux les délinquants dangereux et pas l’inverse », a commenté Me Céline Astolfe, avocate de l’association.

 

Des « parcours d’errance »

« Jusqu’à présent, les enquêtes se contentaient d’arrêter les mineurs. Pour une fois, la justice remonte jusqu’aux personnes qui exploitent ces mineurs », a aussi estimé Kathleen Taieb, avocate habituée des affaires de traite, qui défend un enfant dans ce dossier. Ce procès doit « permettre de changer le regard de la société sur ce phénomène, mais aussi des mineurs eux-mêmes, qui ne se considèrent pas comme des victimes », espère-t-elle.

L’ordonnance de renvoi, rendue le 10 novembre, a suivi les réquisitions du parquet, soulignant le « parcours d’errance » de plusieurs dizaines d’enfants, dont 17 identifiés par les enquêteurs et âgés de 8 à 16 ans. Un « périple » allant de leur « traversée de la Méditerranée » depuis le Maroc ou l’Algérie jusqu’à la Tour Eiffel.

Là, sur le parvis du Trocadéro, les six adultes âgés de 23 à 39 ans sont accusés d’avoir initié les mineurs aux psychotropes « gratuitement, dans un premier temps », détaille la juge d’instruction.

 

Rivotril et Lyrica

« Ils m’ont dit : “Tiens, prends ça, ça va te faire du bien” », affirme un Marocain de 10 ans, cité dans l’ordonnance. « J’ai pris un demi-comprimé de Rivotril et après j’ai continué, continué, continué ». Des doses qui le « poussent à voler » les touristes « et même à être violent ».

La combinaison des psychotropes Rivotril et Lyrica provoque « une dissociation totale du corps et de l’esprit des jeunes consommateurs », souligne la magistrate, qui y voit une « opération de recrutement » des adultes pour créer « une forte dépendance » des enfants à leur égard, afin « d’en tirer un bénéfice financier ».

Les investigations, fondées notamment sur des surveillances physiques, ont montré que le parvis du Trocadéro était « réparti » entre joueurs de bonneteau, vendeurs à la sauvette et voleurs mineurs. Ces derniers occupaient « les escaliers centraux », sous l’œil des majeurs « légèrement en retrait ». Les adultes sont accusés de s’être approvisionnés en psychotropes à Aubervilliers (Seine-Saint-Denis) et dans le nord de la capitale, notamment à Barbès. Sollicités, les avocats en défense n’avaient pas répondu dans l’immédiat.

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